Citations à la musique chez Rimbaud : Analyse du poème « À la musique »
« À la musique » d’Arthur Rimbaud exprime une satire de la bourgeoisie provinciale et célèbre la liberté sensuelle du poète. Le poème oppose l’image figée et ridicule des bourgeois au dynamisme libertaire de l’artiste, instaurant un contraste social et esthétique très marqué.
1. Satire sociale dans « À la musique »
Le poème situe son cadre « Place de la Gare, à Charleville », un espace urbain où la bourgeoisie locale se donne en spectacle. Rimbaud décrit cet environnement avec des termes négatifs comme « taillée en mesquines pelouses » ou « square où tout est correct », traduisant une rigidité et une obsession des normes.
Le choix du mot « square » renforce une idée d’espace rigide, bien ordonné, qu’illustre une société inhérente au conformisme. La bourgeoisie apparaît caricaturale et enfermée dans ses codes :
- « Tous les bourgeois poussifs qu’étranglent les chaleurs portent, les jeudis soirs, leurs bêtises jalouses »
- « L’orchestre militaire, au milieu du jardin, balance ses schakos dans la Valse des fifres » (spectacle guindé)
- « Des rentiers à lorgnons soulignent tous les couacs » (petites disputes et mesquineries)
- « Les gros bureaux bouffis traînant leurs grosses dames » (allusion à la lourdeur mondaine)
Cette description souligne une société superficielle, obsédée par l’apparence et le paraître. Les discussions bourgeoises sont « forts sérieusement » creuses, centrées sur l’argent.
Un contrepoint social s’installe avec « le long des gazons verts ricanent les voyous », jeunes « naïfs » fumant des roses, apportant une note d’insouciance et de liberté.
2. Le poète comme figure de liberté et de sensualité
Rimbaud oppose nettement l’atmosphère terne et codifiée des bourgeois à son propre regard de poète libre :
- « Moi, je suis, débraillé comme un étudiant », figure marginale et provocante
- « Sous les marronniers verts les alertes fillettes », éveil à une sensualité non conformiste
- Le regard du poète se concentre sur « la chair de leurs cous blancs », mettant en avant une observation érotique délicate
L’érotisation de la scène est progressive, suggérée par l’image de la « bottine, le bas » découverte, et renforcée par la phrase « Je reconstruis les corps, brûlé de belles fièvres ». Le poète exprime un désir intense « Et je sens les baisers qui me viennent aux lèvres… »
Cette sensualité affirmée incarne la liberté créative du poète, libérée des contraintes sociales et esthétiques.
3. Synthèse : La portée sociale et poétique du poème
Le poème fonctionne comme une critique sociale acerbe. La bourgeoisie est ridiculisée par des portraits outranciers, insistant sur sa vacuité, son matérialisme et son obsession des apparences. Rimbaud la considère enfermée dans un conformisme terne.
En face, le poète incarne la marginalité, la créativité et la liberté sensuelle. Il échappe aux codes classiques de la poésie traditionnelle, incarnant l’« émancipation » poétique que Rimbaud revendique.
La tension entre ces deux univers souligne aussi le passage de la poésie comme spectacle extérieur à une poésie intérieure, érotique et visionnaire.
4. Citations clés extraites du poème « À la musique »
« Place de la Gare, à Charleville. Sur la place taillée en mesquines pelouses, Square où tout est correct, les arbres et les fleurs, Tous les bourgeois poussifs qu’étranglent les chaleurs Portent, les jeudis soirs, leurs bêtises jalouses. »
« L’orchestre militaire, au milieu du jardin, Balance ses schakos dans la Valse des fifres : Autour, aux premiers rangs, parade le gandin ; Le notaire pend à ses breloques à chiffres. »
« – Moi, je suis, débraillé comme un étudiant, Sous les marronniers verts les alertes fillettes : Elles le savent bien ; et tournent en riant, Vers moi, leurs yeux tout pleins de choses indiscrètes. »
« Je reconstruis les corps, brûlé de belles fièvres. Elles me trouvent drôle et se parlent tout bas… – Et je sens les baisers qui me viennent aux lèvres… »
5. Questions pour approfondir l’analyse orale
- En quoi le poème « À la musique » est-il une satire sociale ?
- Comment Rimbaud illustre-t-il sa fameuse phrase « Je est un autre » dans ce texte ?
- Quelle vision de la société ressort de ce poème ?
- Comment est représentée la figure du poète et sa poésie ?
Points clés à retenir
- Le poème « À la musique » oppose la bourgeoisie étouffée et superficielle au poète libre et sensuel.
- Rimbaud utilise un cadre précis, Charleville, pour dépeindre la société provinciale avec ironie.
- Le poète incarne l’individualité débraillée, portée par l’érotisme et la création.
- La satire sociale dénonce la vacuité des normes bourgeoises et leur conformisme.
- Ce texte illustre la rupture rimbaldienne avec la poésie classique, annonçant une poésie moderne et libératrice.
Citations à la musique Rimbaud : Découvrir la satire bourgeoise et la poésie libérée dans « À la musique »
Quelles sont les citations clés de Rimbaud autour de la musique et que révèlent-elles ? La réponse se trouve dans son poème « À la musique », où le jeune poète mêle satire sociale aiguë et exaltation sensuelle, dessine une société bourgeoise rigide et un poète libre et sensuel. Rimbaud nous offre ainsi un double regard, à la fois critique et passionné, sur la musique, la société et la poésie.
Entrons donc ensemble dans ce « square où tout est correct », naviguons entre bourgeois mesquins et fièvres artistiques, et découvrons comment Rimbaud utilise la musique comme point d’ancrage pour livrer son unique satire sociale et artistique.
Un cadre ordonné pour une bourgeoisie ridicule
Tout commence « Place de la Gare, à Charleville », un lieu précis qui inscrit la scène dans un univers provincial bien campé. Rimbaud ne choisit pas un décor champêtre sauvage, mais un cadre rigide, « taillé en mesquines pelouses ». Cette image n’est jamais anodine : « taillée » renvoie à la taille stricte, and « mesquines » ajoute une touche désobligeante. Le « square », venant de l’anglais, suggère un espace carré, fermé, ordonné à l’extrême, presque écrasant.
Le décor, chargé d’une atmosphère aseptisée, illustre la société bourgeoise qu’il met ensuite en scène. Cette bourgeoisie apparaît comme une caricature pétrie de normes lourdes et de petites mesquineries. Comment ne pas sourire en entendant ces « bourgeois poussifs qu’étranglent les chaleurs » ? Rimbaud dépeint ces personnages ridicules, comme ce « gandin » qui parade ou le « notaire » pendu à ses « breloques à chiffres », objets manifestes de leur vanité.
Ce tableau est complété par des « rentiers à lorgnons » penchant vers des « couacs », ou encore des « gros bureaux bouffis traînant leurs grosses dames ». L’image est grotestque, mais efficace. La bourgeoisie apparaît comme engoncée dans des apparences vides, plus préoccupée par l’argent et les réputations que par la vie ou l’âme même de la musique.
La musique comme spectacle bourgeois
Dans ce décor aseptisé, l’orchestre militaire installe une musique mécanique, presque militaire, qui parodie la joie. L’« orchestre militaire, au milieu du jardin, balance ses schakos dans la Valse des fifres ». On imagine un spectacle protocolaire, figé, rythmé par des sonorités martiales qui contrastent avec la vraie musique sensuelle. Le choix de Rimbaud colle parfaitement à sa satire : la musique n’est qu’un artifice de ce monde bourgeois, une scène pour « parade le gandin » et autres. Le rythme martelé masque la vacuité des échanges prétentieux :
« Forts sérieusement discutent les traités, Puis prisent en argent, et reprennent : En somme !… »
Ici, la musique rythme la nullité des débats, renforçant la superficialité ambiante.
À l’opposé, le poète libre et sensuel
Dans ce monde étouffant, surgit la figure du poète, débraillée et revendiquée comme telle. Rimbaud s’identifie, presque en contrepoint, :
« – Moi, je suis, débraillé comme un étudiant, Sous les marronniers verts les alertes fillettes : Elles le savent bien ; et tournent en riant, Vers moi, leurs yeux tout pleins de choses indiscrètes. »
On quitte l’univers figé pour entrer dans la zone du désir et de la liberté. Le poète ne critique pas que la bourgeoisie, il affirme sa sensualité, son regard et sa création qui déchirent le cadre social. Il « ne dit pas un mot », mais le regard dit tout : il scrute « la chair de leurs cous blancs brodés de mèches folles », assiste à la « courbe des épaules » et « reconstruit les corps, brûlé de belles fièvres ».
Ce poème, loin d’être une simple satire, devient une déclaration d’amour sensuelle et esthétique à la vie, à la chair, à l’art. Rimbaud ose la dimension érotique, en notant pudiquement « J’ai bientôt déniché la bottine, le bas… – Et je sens les baisers qui me viennent aux lèvres… »
Satire sociale et libération poétique : la synthèse Rimbaud
Aspect | Illustration par citation | Signification |
---|---|---|
Satire de la bourgeoisie | « Place taillée en mesquines pelouses » ; « les bêtises jalouses » ; « parade le gandin » | Critique de la rigidité, du conformisme et de l’ostentation bourgeoise. |
Portrait social comique | « Les gros bureaux bouffis traînant leurs grosses dames » ; « officiers cornacs » | Ridiculise les personnages par leurs traits physiques et comportements. |
Poète marginal | « Moi, je suis, débraillé comme un étudiant » | Affirme la liberté, la différence sociale et artistique. |
Éveil des sens | « Elles tournent les yeux pleins de choses indiscrètes » ; « Je reconstruis les corps, brûlé de belles fièvres » | Exprime l’éveil, la séduction et l’érotisation au-delà des conventions. |
En somme, le poème oppose deux mondes : la bourgeoisie étouffée par ses normes vides et le poète brûlant de sensualité et de liberté.
Quelques idées pour comprendre et questionner « À la musique » de Rimbaud
- Pourquoi la musique sert-elle de cadre à cette critique sociale ? Parce qu’elle incarne le spectacle et l’artifice, parfait reflet des routines bourgeoises.
- Comment Rimbaud illustre-t-il le concept « Je est un autre » ? Par la distance ironique qu’il prend avec cette société, tout en se projetant en poète visionnaire.
- Que révèle la vision sociale de Rimbaud ? Une société figée, obsédée par l’apparence et l’argent, incapable de véritable création artistique.
- Comment est représenté le poète ? Libre, sensuel, marginal, loin des conventions, il crée et vit une expérience esthétique intense.
Un dernier clin d’œil : quelques citations incandescentes et délicieusement moqueuses
« Tous les bourgeois poussifs qu’étranglent les chaleurs portent, les jeudis soirs, leurs bêtises jalouses. »
« L’orchestre militaire, au milieu du jardin, balance ses schakos dans la Valse des fifres. »
« Les gros bureaux bouffis traînant leurs grosses dames. »
« Le long des gazons verts ricanent les voyous… »
« Moi, je suis débraillé comme un étudiant… »
« Je reconstruis les corps, brûlé de belles fièvres… »
Avez-vous déjà ressenti cette dualité ? Le poids des normes face à votre propre liberté ? Rimbaud, dans « À la musique », nous force à regarder cette lutte, avec un sourire en coin et un souffle sensuel qui bout sous les convenances.
Alors, la prochaine fois que vous entendrez une valse militaire, imaginez ce square à Charleville, où la musique masque la bêtise et où le poète, lui, s’avance, brûlant de nouvelles fièvres. C’est peut-être cela, la vraie musique de Rimbaud.
Q1 : Comment Rimbaud critique-t-il la bourgeoisie dans « À la musique » ?
Rimbaud montre la bourgeoisie comme rigide et superficielle. Il décrit un décor froid et ordonné, avec des personnages ridicules et obsédés par l’apparence. Cette satire met en lumière leur vide et leur bêtise.
Q2 : Quelle place la musique occupe-t-elle dans le poème de Rimbaud ?
La musique est un prétexte pour exposer la société bourgeoise et ses hypocrisies. Elle symbolise aussi l’art convenu et artificiel que Rimbaud oppose à la liberté du poète.
Q3 : En quoi le poète est-il opposé à la bourgeoisie dans « À la musique » ?
Le poète est libre, sensuel et créatif, en rupture avec l’étroitesse et la fausseté de la bourgeoisie. Il affirme son individualité et son désir, échappant aux normes et au conformisme.
Q4 : Comment Rimbaud exprime-t-il l’éveil de la sensualité dans ce poème ?
Il décrit les filles en détail, exprimant un désir vif et une passion brûlante. Sa sensualité grandit au fil du poème, passant de l’observation au sentiment amoureux et presque érotique.
Q5 : Quel rapport y a-t-il entre « À la musique » et la phrase « Je est un autre » ?
Le poème illustre cette idée par la différence entre le regard du poète et la société. Rimbaud crée un moi pluriel, mêlant observation, désir et création, défiant l’unité du sujet classique.